Salut les confinés ! – 2-

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais. Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Chaque matin la presse est épluchée sur le net. Inutile de dire le sujet de mes recherches. Les infos qui nous parviennent interrogent la gestion de la crise par le gouvernement :

  • L’étude des épidémiologiste anglais (Neil Ferguson -Imperial College, Londres – voir cet article du Monde) met en perspective l’épidémie : progression exponentielle, pas de repli véritable du virus tant qu’une part importante de la population (60 à 70 % de la population) n’aura pas été contaminée et n’aura développé ainsi son immunité (« immunité collective ») .
  • Ensuite plusieurs scénarios sont envisagés pour freiner la progression de la maladie. Un chiffre choc : si rien n’est fait, en 2020, 510 000 morts au Royaume-uni en 4 mois(à droite ci-contre les projections pour GB et USA).
  • Les confidences d’Agnès Buzyn dans la presse : En tant que médecin au fait de l’actualité de la Chine, elle aurait prévenu le gouvernement dès janvier de la gravité de l’épidémie. On aurait pu espérer qu’elle remue ciel et terre pour donner l’alerte. Elle a préféré se prêter à une « mascarade » – ce sont ses termes-, à quitter son poste de ministre de la Santé, à se présenter à une élection qui auraient dû être reportée et supporter une défaite peu glorieuse. Edouard Philippe n’a pas démenti, arguant que les scientifiques n’étaient pas tous d’accord sur le sujet.
  • Un collectif de médecins porte plainte contre le premier ministre et le ministre de la santé pour n’avoir pas agi à temps pour endiguer l’épidémie de Covid-19 en France. Il leur reproche de s’être abstenus « volontairement de prendre ou de provoquer les mesures permettant […] de combattre un sinistre de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes »,

Au bout du compte, beaucoup de temps a été perdu, avant qu’on commande la fabrication des masques auprès des rares entreprises françaises qui en avait gardé la capacité, avant d’envisager la fermeture des écoles, puis des commerces et lieux publics, puis de déclarer le confinement.

Comment l’expliquer ? Comment expliquer que des responsables politiques bien informés, que des scientifiques compétents aient pu hésiter, aient pu reporter le moment des décisions alors que les données de l’épidémie étaient sur la table.

A mon sens il s’agit d’une méconnaissance profonde (ou un déni tacticien ?) de ce qu’est une progression en matière d’épidémie.

Chaque jour, les autorités ont rendu publics les chiffres de l’épidémie, le nombre de décès, le nombre de cas supplémentaires depuis la veille, mais un autre chiffre -stratégique, lui- restait dans l’ombre : tous les 3 jours le nombre de cas double ! C’est ce qu’on appelle une progression géométrique (et non pas arithmétique). Illustrons les deux termes :

-Progression arithmétique : A partir de 1000 cas au jour J, la progression est, par exemple de 500 cas par jour. A J+1 on en est à 1500 cas, à J+2 on en est à 2000 ; au Jour J+9 on en est à 5000 cas. A J +12 on en est à 6500 cas

-Progression géométrique (ou exponentielle) : A partir de 1000 cas au jour J, le nombre de cas double tous les 3 jours. A J+3 on en est à 2000, à J+6 on est à 4000, à J+9 on en est à 8000. A J +12 on en est à 16000cas !

Au fur et à mesure de l’avancée dans le temps, l’écart entre deux progressions s’agrandit, devient monstrueux. Tout s’est passé comme si nos responsables ne connaissaient que l’arithmétique Et puis en cas de doute il suffisait de regarder les chiffres de l’Italie qui avait juste 8-9 jours d’avance sur nous.

Du coup nous nous sommes tournés vers l’exemple chinois en l’édulcorant puisque nos mœurs politiques et sociétales ne peuvent être comparés.

Ça donne la quarantaine en conservant une bonne partie des transports, ça donne le confinement mais sans comité de quartier du parti communiste pour contrôler, ça donne les autorisations de sortie papier versus le trackage numérique de tous les déplacements des confinés et surtout la géolocalisation de tous les malades testés positifs à travers Baï Du, le google chinois …

Du coup, on a négligé d’autres exemples :

-la Corée du Sud qui a mis en place un dispositif massif de tests : 10 000 par jour (au moment où on en pratiquait 1000 en France) et un suivi numérique et physique de tous les infectés. Résultat : une épidémie contenue assez tôt

-Taïwan et Singapour se sont appuyés énormément sur le numérique et des mesures de confinement très ciblées

Ces deux exemples démontrent leur efficacité avec un endiguement efficace de la maladie. Il faut dire que les populations ont encore en tête le SRAS de 2003 qui les avaient durement frappées (à la différence de la France largement épargnée).

Ces méthodes n’étaient pas applicables en France pour des raisons culturelles (rejet d’un état policier…) mais aussi de moyens techniques : la pénurie de masques, la faible disponibilité des tests, la faible réactivité sur le numérique…

Danièle, mon épouse qui partage mon confinement, tient un journal régulier dans lesmotsjustes

2 commentaires sur “Salut les confinés ! – 2-

  1. Bonjour Norbert

    Le confinement est une occasion de renouer les contacts virtuels / le Covid 19 laminent toutes les certitudes : les experts n’ont jamais été aussi nombreux mais bafouillent un peu
    Difficile de comparer les réactions de chaque pays si différents
    Mais la discussion est intéressante
    J’y participerai probablement

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  2. Bonjour Norbert,
    De fait beaucoup n’y ont pas cru et ont pensé qu’il s’agissait d’une grosse grippe.
    Encore maintenant certains trouvent qu’on est hystérique puisque seulement 0,3% de la population est touchée…

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