Salut les déconfinés -1-

Economie : c’est reparti ?

Rappelons-nous : au lendemain du confinement installé le 17 mars, chacun se faisait une idée de la fin de ce mauvais passage. Ainsi le déconfinement nous ramènerait nos libertés d’aller et venir, de travailler, de fréquenter nos lieux collectifs, de voir nos amis, de partir en vacances … On connaît la suite : comment ces espoirs ont été largement relativisés par la réalité de l’épidémie.

Pour l’économie ce fut un peu pareil. Le déconfinement donnerait le signal du redémarrage de l’économie qui avait été en grande partie préservée par les mesures de soutien aux entreprises, de maintien des salariés grâce au chômage partiel… L’économie était sur pause, il suffisait de basculer sur Play pour que chacun retrouve son activité. Mais plus l’échéance se rapprochait, plus on prenait conscience que ça risquait d’être plus compliqué.  

Redémarrage : Pourquoi ce n’est pas si simple

Il faut bien se rendre à l’évidence : le virus est présent et restera présent pour un bout de temps. Si on veut éviter une seconde ou une troisième vague qui pourrait submerger de nouveau le système de santé, il faudra maintenir un dispositif important de précautions. Les restaurants, les discothèques, les concerts ne sont pas près de réouvrir. Et dans de nombreux secteurs les mesures de protection sanitaire s’opposeront à une pleine activité.  

Et puis ça dépendra des décisions individuelles des entrepreneurs, des salariés, des clients, des syndicats, de la justice. Autant il suffisait au moment de la mise en place du confinement de quelques décrets et des gendarmes postés aux carrefours, autant le redémarrage de l’économie est le résultat d’une multitude de variables souvent imprévisibles.

Les fabricants de bière ne peuvent reprendre leur pleine activité que si les bars, les restaurants, les concerts et les apéros entre amis réamorcent la demande. En attendant ils se demandent si une partie de la production ne devait pas partir aux égouts ou à la distillation.

Certaines entreprises ont une grande difficulté à organiser un process de production respectueux des gestes barrière. C’est ainsi qu’Amazon, contraint de fermer par décision de justice à la demande de la CFDT, a d’elle-même suspendu momentanément son activité en France.

A Renault Sandouville, les syndicats majoritaires (Force Ouvrière, la CFE-CGC et la CFDT) étaient en train de mettre au point un accord avec la direction pour une réouverture en toute sécurité, lorsque la CGT (un tiers des voix aux élections professionnelles) a obtenu une décision de justice (sur un défaut dans la consultation obligatoire) pour annuler la reprise. Dans bien des entreprises, la CGT, parfois à raison, en face de risques réels, parfois en application d’une ligne politique, risque de tout faire pour s’opposer à la reprise d’activité.

Mais il n’y a pas que des incertitudes. Pendant la crise un certain nombre de secteurs ont bien résisté, ou même progressé. Les services publics de base (gestion des déchets, propreté, sécurité) n’ont pas flanché. Les industries de réseau : l’eau, l’électricité, les fournisseurs internet ont assuré. Les GAFA et autres Netflix ont tiré avantage du confinement. Plus généralement le numérique s’est introduit dans tous les process de travail avec le télétravail et les services à distance. Bref, les 65% d’activité (73% en avril) assurés tout au long du confinement sont restés solides, loin de l’idée d’effondrement généralisé chère aux collapsologues. 
Mais que se passera-t-il pour les 35% (27% en avril) restants ? Beaucoup d’inconnues président au redémarrage. 

Anticiper en zone d’incertitude

Du coup, peu d’économistes se hasardent à faire des pronostics : Reprise rapide en V, stagnation durable en L …

Alors il n’est pas interdit aux économistes amateurs de faire leurs prévisions. Les miennes, en l’occurrence : A court terme, l’économie est sous la férule de l’évolution de l’épidémie. De la permanence de sa virulence dépendra la reprise qui pourrait subir un effet persistant des précautions sanitaires.  Au-delà, à moyen terme il n’y a pas de raisons que les affaires ne reprennent pas à un bon rythme, malgré certains secteurs durablement touchés comme le transport aérien, l’industrie du tourisme et celle du spectacle. En effet les habitudes de consommation dans ces domaines auront du mal à se rétablir ou à trouver un nouveau modèle.
 Il est, hélas, certain que les inégalités devant l’emploi vont se creuser et que les précaires seront les premières victimes d’une hausse prévisible du chômage

Et puis, le « monde d’après » ne pourra faire l’économie d’un examen de son développement. Quelles sont les activités essentielles ? Quelles sont les activités inutiles, voire nuisibles. Il faut notamment arrêter d’investir dans les énergies fossiles au profit de la transition énergétique. 

3 commentaires sur “Salut les déconfinés -1-

  1. Je suis bien d’accord avec toi, on n’a pas fini de vivre avec ce foutu virus et le monde va changer, on ne sait pas trop comment. Tout comme le 11 septembre a renforcé le flicage et la répression sous prétexte d’antiterrorisme brandi à tout propos, ce virus changera nos vies. Le télétravail deviendra plus courant et il semblerait qu’il soit apprécié de la majorité des personnes qui l’ont pratiqué (sauf peut-être les femmes seules avec enfants, les pauvres!). La vie sociale sera affectée, l’autre sera vu comme un danger potentiel, et cela impactera nos psychés. La culture devra se réinventer, faute de grands rassemblements comme les festivals ou les concerts, ce qui est bien triste (et pourtant je n’aime pas les foules). Et les fous qui contestent la science deviendront à mon avis une menace grandissante, en tout ici aux USA, où nous sommes dirigés par un cinglé entouré de courtisans pourris, corrompus jusqu’à la moelle, et qui veulent détruire les institutions. Les USA vont très mal, vivre ici est une torture ces jours-ci. Le Docteur Fauci, qui est le seul à faire sens dans l’équipe au pouvoir, est menacé de mort et doit être protégé par des gardes du corps ! Dans quel monde vivons-nous ? Je n’aurais jamais imaginé vivre cela quand j’ai émigré. Les USA étaient encore une sorte de modèle (avec des bémols bien sûr) mais maintenant c’est le repoussoir mondial. Et quand on voit les régimes dictatoriaux ailleurs (Chine, Brésil, Corée du Nord, Philippines) il y a de quoi se demander si une partie de l’humanité n’est pas tombée sur la tête. Et quel avenir pour ceux de la génération des 30/40 ans ? Bref, je ne vois pas la vie en rose. Hélas !

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  2. « Ne vous méprenez pas, nous sommes très largement d’accord avec la tribune signée par Roux de Bézieux et ses amis et applaudissons le sérieux et la magnitude de la réaction des Etats face à la crise qui s’annonce. Mais quand même…

    On ne peut s’empêcher de s’émerveiller de la rapidité du patronat français, d’ordinaire si constant à dénoncer la dépense publique étouffeuse de l’initiative privée, à réclamer l’intervention sonnante et trébuchante de l’Etat pour sauver les entreprises.

    Ce virage keynésien est d’autant plus frappant que la référence idéologique patronale était jusqu’à présent Schumpeter (économiste autrichien 1883-1950) et sa « destruction créatrice » (= la croissance éco est tirée par de nouveaux entrants/business qui en émergeant détruisent et remplacent les business/acteurs précédents). Or…

    … qu’est ce que la crise du Coronavirus si ça n’est des circonstances radicalement schumpeteriennes : remise en cause des modèles existants — de l’aérien à la délocalisation tous azimuts — épreuve finale pour des entreprises « zombies » ne tenant que par la dette ? Et vous qui pensiez que Binoche/Lindon/Hulot avaient la palme de la tartufferie… »

    C’est TTSO, Time To Sign Off [ Venu des Etats-Unis, ce site propose de résumer tout ce qu’il faut savoir de l’actualité web du jour] je n’y peux rien, je les trouve bons !

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