
Vote utile : Pour qui , pour quoi ?
C’est une petite musique que l’on entend dans les médias, portée par la France Insoumise. La gauche divisée n’a aucune chance de marquer ces élections à part le candidat Mélenchon en hausse dans les sondages et susceptible de se qualifier au second tour pour peu que l’électorat de gauche abandonne les autres candidats.

Le vote Mélenchon serait le seul vote utile quand on est de gauche. Cette notion de « vote utile » mérite d’être examinée.
Au fait : Pourquoi vote-t’on ? et surtout à cette présidentielle telle que l’a forgé la Vème république et qui n’a pas grand’chose à voir avec les mécanismes en vigueur chez nos voisins, pourtant pas plus, pas moins démocrates.
- On vote pour élire le président de son choix. Mais c’est un peu théorique. Chacun d’entre nous peut s’interroger en regardant en arrière. Combien de fois notre candidat préféré s’est -il retrouvé finalement président ? Moi jamais, même si je me suis réjoui profondément de l’élection de François Mitterrand en mai 1981. Je ne me souviens pas précisément de mon choix du premier tour. Sans doute Huguette Bouchardeau candidate du PSU soutenue par plusieurs organisations d’extrême gauche. Au second tour ce fut évidemment Mitterrand.
- C’est que les votes du premier et du second tour n’ont pas la même fonction. Au deuxième tour il n’y a plus que deux candidats. Aux législatives les candidats peuvent se maintenir dès le moment qu’ils réunissent au moins 10% des électeurs inscrits, dans certains cas, ce sont 4 candidats qui restent en lice. A la présidentielle, c’est sans appel : on peut faire une troisième place brillante, on est obligatoirement éliminé. Alors on nous répète la maxime : au premier tour on choisit (le candidat le plus en accord avec ses convictions), au second tour on élimine (le candidat qu’on ne voudrait surtout pas voir président).
- Mais les choses se compliquent. En 2002, le candidat Jospin qui sortait avec un bilan plutôt positif de cinq années à la tête du gouvernement, ne parvient pas au second tour du fait de la multiplication des candidats à gauche. Beaucoup de mes amis avaient préféré voter Taubira, Chevènement, Besancenot ou Mamère. Evidemment au second tour, c’est sûr, ils voteraient Jospin. Mauvais calcul ! C’est comme ça qu’on s’est retrouvé face à un duel Le Pen-Chirac. Du coup le premier tour ce n’est pas seulement exprimer un choix, il faut aussi penser au second tour. C’est là qu’intervient la notion de « vote utile ». Nous pouvons voter pour un candidat qui ne recueille pas totalement notre accord parce qu’il serait bien placé pour bloquer un autre candidat bien placé pour le second tour et que nous voulons absolument éliminer de la compétition.
- Mélenchon nous explique que même si nous ne sommes pas complètement d’accord avec sa personnalité, son programme, il faut lui permettre d’accéder au second tour contre Macron qui y sera dans tous les cas. On connaît d’avance le résultat, vu le rapport de force, Macron aura une victoire écrasante quelle que soit la qualité de la campagne de Mélenchon. Alors quelle sera donc l’« utilité » de notre vote en dehors du plaisir de voir Mélenchon à la télévision à la place de Marine Le Pen ?
- Derrière cette question se profile une autre. Dans une gauche rétrécie, désemparée à qui peut-on se fier pour reconstruire une alternative à gauche ? Sans doute pas à Mélenchon : qu’a-t-il fait de son -relatif- succès (à 19,6%) en 2017. A-t-il cherché à nouer des liens avec les autres formations à gauche, avec les verts et à la gauche de la gauche. Son obsession : la prochaine présidentielle et sa troisième candidature, quitte à s’opposer, comme aux municipales à Marseille aux listes communes et citoyennes du Printemps Marseillais
- Je ne suis pas prêt à accorder un rôle de leader dans la recomposition de la gauche à un Mélenchon ami de Maduro, de Castro, compréhensif vis-à-vis de Poutine, s’abstenant devant la dénonciation du « génocide » des Ouigours en Chine. Son anti-américanisme, son hostilité envers l’Union Européenne sont ses seules boussoles internationales.
- Alors, ce premier tour, je voterai selon mes convictions Yannick Jadot, car c’est le seul à incarner la lutte pour le climat et pour la justice sociale.
- Pour le second, peu de chance, sauf miracle, de trouver Mélenchon dans les bureaux de vote. Face à Marine Lepen , en 2017 j’avais voté Macron. On pouvait avoir un doute sur le « ni gauche, ni droite ». En 2022 le doute n’est plus permis. Je pense que j’irai à la pêche.