Eté indien en Italie

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On a tourné autour du Pô

Nous sommes partis à trois camping-cars cette fois, trois couples, six adultes. Une première expérience ! L’idée c’était de suivre le Pô de son cours moyen jusqu’à l’embouchure

Il fallait d’abord se retrouver venant de lieux assez éloignés les uns des autres (Charente, région Lyonnaise, Venise). À raison de plusieurs échanges de mails pour concilier les exigences des uns et des autres (distance à parcourir en un jour, soleil, objectif final, récupération d’une participante en cours de route), un lieu fut trouvé :

Premier point de chute : sortie Broni-Stradella de l’autoroute Turin-Venise chez des viticulteurs accueillant gratuitement les camping-cars dans sa cour et proposant une dégustation de leurs produits. Situés au sud entre Pavia et Piacenza, entre la Lombardie et l’Emilie-Romagne, les Colli Piacentini, dominent le Pô, avec de douces ondulations, derniers contreforts des Apennins.

Merveilleux petits coteaux plantés en vigne sous le soleil d’automne dans un paysage qui rappelle les coteaux du beaujolais. Les productions sont très variées, suivant ainsi la diversité des cépages utilisés : barbera, croatina, cabernet sauvignon, pinot noir, chardonnay, malvoisie, ortrugo, pinot gris et sauvignon blanc.

Après dégustation et achat de vins, repas au bord du Pô dans un restaurant : All avamposto sul grande fiume. Le resto mérite parfaitement son nom, face au cours majestueux du Pô, particulièrement large à ce niveau.

Les constructions sont interdites dans cette zone hautement inondable. Alors, c’est sur des barges posées à terre qui peuvent flotter en cas de crues que le restaurateur et ses voisins se sont installés.

Depuis 2018, nous avions repéré cet endroit surprenant, mais jamais ouvert lors de nos passages. A l’origine installé sur la barge, l’établissement, à moitié embarcation, s’est étendu sur une terrasse arrimée à la terre ferme. La salle est pleine (heureusement nous avions retenu), c’est le rendez-vous des travailleurs du coin et de quelques connaisseurs. Bonne cuisine italienne simple et goûteuse. Des pâtes, des saucisses et du poisson, arrosés d’une petite piquette fraîche et frizzante.

Départ pour Pavie, son pont couvert, sa cathédrale et sa vieille ville. Nous dormons en contrebas d’un grand parc public qui borde le Ticino, juste avant le confluent avec le Pô.

En route pour Crémone où la halte est encore plus séduisante, encore un parc public au bord du Pô, des promeneurs avec ou sans chien, des coureurs, des voies cyclables et à proximité un camping pour prendre des douches. Alors on sort les tables au bord du fleuve, sous un soleil estival.

La façade de la cathédrale toute de marbre blanc est splendide…

mais ressemble à un décor de théâtre dès qu’on fait le tour et découvre la traditionnelle église en brique, cette brique, omniprésente dans toutes les cités que nous avons visitées.

Il fait si beau que nous restons deux jours.

Départ pour Sabbioneta et Mantoue (toutes deux classées au patrimoine mondial de l’UNESCO). C’est dimanche, il y a un monde fou sous le beau soleil d’octobre. Sabbioneta est toute petite derrière ses remparts imposants.

Mantoue est splendide avançant comme la proue d’un navire sur les lacs artificiels qui ont été créés au 12e siècle pour la protéger des inondations du Mincio qui descend du lac de garde. Il y a tant à voir que nous restons deux jours.

Si nous tardons encore nous ne verrons jamais le delta du Pô. Nous sautons Ferrara et choisissons d’arriver à Comacchio, tout au sud du delta.

C’est un bon choix, car cette petite ville est imposante dans sa simplicité. Vieille ennemie de Venise qui ne supportait pas son implication dans le commerce du sel, elle a été rasée en 932, mais s’est reconstruite avec superbe autour de ses canaux et des ponts qui les franchissent pour exploiter ses richesses de pêche, de sel et de marais mis en culture.

Puis c’est la splendeur du delta pour qui aime ces paysages de terre et d’eau, de ciels et d’oiseaux. Un peu de la Camargue, un peu de la Charente, l’immensité en plus et la pleine lune qui rend les oiseaux très bruyants toute la nuit.

La pêche est omniprésente dans la lagune, dont tout le littoral est équipé d’une multitude de cabanes à carrelet, ces filets carrés qu’on remonte avec l’espoir de belles prises

Ce delta a inspiré de nombreux créateurs italiens célèbres. Comacchio, c’est aussi le lieu où fut tourné « La fille du fleuve » un des premiers films de Sophia Loren.

Ses photos avec les habitants de Comacchio figurent partout dans la ville. Le mambo dansé par la Loren reste indubitablement un des sommets de l’érotisme des années 50. Réalisé par Mario Soldati (par ailleurs bon écrivain), co-écrit par une pléiade de scénaristes-romanciers-poètes dont A.Moravia, G.Bassani et P.P.Pasolini (quelle brochette !), ce pur mélodrame vaut surtout par sa peinture des petites gens qui vivent du fleuve.
Un Pô déjà figure de cinéma chez Visconti (« Ossessione », 1942) et qui sera notamment si bien filmé par Antonioni, d’abord dans un documentaire (« Gente del Po », 1947, court-métrage de 11 minutes) puis dans deux fictions (« Le cri », 1957, et « Le désert rouge », 1964) mettant bien en valeur ces paysages de marécages et de lagunes où se mêlent eau douce et eau de mer.

Deux jours à admirer et nous nous séparons là sur le parking d’une auberge au bord de l’eau.
Quelques ennuis mécaniques mineurs ont marqué le voyage (plaquettes de frein au départ, courroie d’alternateur en cours de route) et quelques découvertes culinaires : les orrechiette à la cime di rappa, les raviolis d’ortie et les raviolis de zucca cuisinés dans le camping-car auxquels il faut ajouter quelques repas au restaurant. Des moments de découvertes et de convivialité à voir dans ce film photographique

Notre retour à la maison a marqué le début d’une nouvelle aventure : Accueillir un petit chiot suite au décès de notre cher Wiki. Dans l’élevage, ce sont dix chiots Border Collie qui ont été menés à bien par leur brave mère. Nous avions déjà choisi le nôtre, mais ses 4 frères étaient aussi craquants.
Alors bienvenue à Snoopy !

L’hiver dans le Berry : vignes et truffes

Il n’y a pas que des  grandes cultures dans la campagne berrichonne. Jean, notre ami viticulteur sur l’appellation de Quincy, nous avait concocté un programme de travail dans les vignes, mais aussi de découvertes du terroir. Nous, c’est à dire les sociétaires du Groupement Foncier Viticole (GFV)  détenteurs de parts dans le vignoble qui se réunissent après la Saint Vincent, patron des vignerons, et les autres habitués du domaine.

Travail le matin dans les vignes à « tirer les bois ». C’est l’époque de la taille sur les ceps qui réclame des as du sécateurs qui connaissent bien le développement de la plante et les exigences associées au type de taille : ici le double guyot. Pas à notre niveau , nous tous qui sommes des amateurs et bénévoles. Alors on nous laisse une tâche indispensable mais peu qualifiée: le tirage des bois à savoir : détacher les liens et vrilles qui s’accrochent, trop solidement à notre goût,  à la quadruple rangée de fil de fer, sortir les sarments et les mettre en tas.

La matinée avance et les groupes dans les rangs, arrivent au bout des lignes. C’est l’heure de passer à autre chose. Les sexagénaires -la plupart d’entre nous- se sont pas fâchés de reposer leur dos et de regagner le repas préparé au gîte.

Jean nous a annoncé une visite, un peu mystérieuse, chez des paysans qui produisent des truffes.

Nous arrivons chez les Borello sous un ciel gris, quelques gouttes de pluie, pas de quoi nous arrêter. Stéphanie, qui s’occupe aussi des gites à la Fontenille , nous présente son activité et son chien Alfi,  un Border Collie trouvé à la SPA, qu’elle a dressé patiemment à faire le job : repérer au pied des arbres le précieux champignon

Eh oui ! Il n’y a pas que dans le Périgord que l’on trouve le diamant noir : la très réputée Tuber Melanosporum, on en récolte aussi dans le Berry !

Une fois dans la truffière, des chênes pubescents et des chênes verts d’une quinzaine d’années, Alfi flashe sur le premier arbre. Il tourne autour pour préciser la localisation et Bing ! un coup de patte discret sans tenter de creuser et le voilà qui attend patiemment la trouvaille … et sa récompense : un bout de saucisse.La truffe se trouve entre 5 cm et 20cm de la surface. Il faut la sortir avec délicatesse pour ne pas l’endommager.

IMG_20180219_153713_553 Les truffes se plaisent dans ce sol léger, peu profond, installé sur des tables calcaires. Les chênes sont plantés mycorhizés, c’est à dire que les racines sont imprégnées des spores du champignon qui se développe tout autour de l’arbrisseau. Le mycélium colonise ainsi un périmètre où rien ne pousse : on l’appelle « le brulé », signe d’un bon développement du champignon.

A peine sortie de la terre, la truffe exhale son parfum typé, sensible à 2-3 m, et tellement fort lorsqu’on la porte sous le nez. C’est bientôt la fin de la saison (cette année elle a commencé dès fin novembre), c’est une période où on a plus de chances de trouver des truffes très parfumées qu’au tout début de l’hiver.

Le précieux champignon se retrouve dans le panier, encore entouré de sa gangue de terre. Jean est très fier d’exhiber ce panier rempli au bout de deux heures de recherches. 27973732_10155504975567545_441964501784863854_nDe retour au gîte , nos hôtes nettoient les précieuses truffes en les brossant délicatement sous un filet d’eau, mais leur parcours n’est pas encore terminé. Il faudra les trier , les contrôler en les « canifiant », c’est à dire en s’assurant d’un coup de canif qu’il s’agit de la bonne espèce et qu’elle n’a pas été corrompue par quelque parasite.

20180219_171749Devant ces merveilles, Max reste bouche bée.

Chacun pourra ensuite repartir avec sa truffe proposée à un bon prix. A déguster comme un produit frais , pas plus d’une semaine au frigo, ou congelée (elle peut se garder plusieurs mois c’est le meilleur moyen de conservation). Nous, nous l’avons introduite 48 h avec les oeufs de nos poules au frais dans une boîte hermétique. A la coque, le parfum se retrouve très intense dans le jeune d’oeuf. Si intense qu’il ne plaît pas à tout le monde, notamment aux enfants. Puis nous l’avons râpée en vue d’un beurre de truffe.

Cet hiver dans le Berry se termine par un bon coup de froid, inhabituel pour une fin-février.

Et pourtant sur le chemin du retour, nous trouvons un signe annonciateur des beaux jours. Les grues cendrées envahissent le ciel, des escadrilles ordonnées en chemin vers les terres du Nord qui font halte dans les champs labourés.grues

Auvergne : un vignoble à découvrir

Trois jours de beau temps en camping-car en Auvergne : une belle occasion de découvrir des paysages que nous connaissions peu ou pas. Mais quand Danièle m’a annoncé qu’on pourrait visiter les différents crus d’Auvergne, je suis resté perplexe.

En Auvergne, on connait le vignoble de Saint-Pourçain, célèbre pour son rouge  léger. C’est dans le département de l’Allier. Mais dans le Puy-de-Dôme ?  Aucune appellation ne me vient à l’esprit, je sèche.

Un nom revient à Danièle : Corent , moins de 15 km au sud de Clermont, une de ces collines découpées (un puy) dans ces plateaux de basalte au-dessus de l’Allier.ville-Gauloise C’est sur ce relief tabulaire que les gaulois auvergnats – les arvennes – avaient installé sans doute leur capitale : plusieurs centaines d’habitations, un sanctuaire, un théâtre, des ateliers…Mais ce qui nous intéresse aujourd’hui se situe sur les pentes exposées au Sud: Les rangs de Gamay bien alignés, dans la perspective des puys qui se succèdent jusqu’au Puy de Dôme. Lire la suite « Auvergne : un vignoble à découvrir »

Cinq leçons pour connaître la vigne et le vin … et apprécier les bonnes bouteilles. 1 – L’invention du vin

Depuis le temps où je terminais  mes études d’ingénieur dans la zone viticole Fitou-Corbières-Minervois à arpenter les vignes, établir les essais sur le terrain et suivre les vinifications séparées, de la cave aux jurys de dégustation, j’ai conservé un intérêt constant  pour le monde de la vigne et du vin, bien que jamais à titre professionnel.  Une fois à la retraite j’ai pris l’initiative de partager avec mes proches mes connaissances et mes sensations à propos de ce breuvage qui a accompagné pendant des millénaires la marche en avant de la civilisation occidentale.

L’alcool un compagnon fidèle de l’homme

Vers le milieu du IXe millénaire av. J.-C.,  dans le croissant fertile (l’actuelle Irak), des groupes humains, déjà en partie sédentaires, commencent à  domestiquer des animaux (mouton, chèvre) et les plantes (blé, orge suivis de légumineuses) dans un but alimentaire. Ils inventent l’agriculture.  Ils ne vont pas tarder à découvrir les boissons alcoolisées, leurs procédés de fabrication et leurs effets.

Dans le Caucase, sur le site d’Areni, les chercheurs ont mis à jour une cave viticole qui remonte à 4100ans avant JC. En Iran les vestiges retrouvés au nord des monts du Zagros sont plus anciens (5400-5000 av. J.-C.).  Pour la bière : les preuves formelles de son existence, découvertes dans la province de Sumer, datent  du IVe millénaire av. J.-C.Noe

Dans la bible, Noé réchappé du déluge est le premier viticulteur et n’échappe pas à l’ébriété, à la connaissance de ses trois fils : Sem, Cham et Japhet.  Cham, qui a retrouvé son père ivre et nu, verra sa descendance (son quatrième fils Canaan) maudite.

Sur tous les continents, les humains déploient des trésors d’ingéniosité pour élaborer des procédés qui conduisent à l’alcool avec la matière première dont ils disposent: orge , riz, maïs ou manioc pour la bière,  sève d’agave pour le  pulque , une boisson au degré d’alcool faible (6-8 degrés) élaborée par les indiens avant la mise au point de la Tequila,  lait fermenté pour le Kefir, miel pour l’hydromel, le chouchen de nos amis bretons, canne à sucre pour le vesou , le vin de canne qui donnera le rhum, sève d’érable ou de bouleau qui donne des vins clairs,  pommes pour le cidre  L’inventaire s’élargit encore avec la distillation introduite en Espagne par les arabes au VIIIème siècle.

 Au coeur de tous ces procédés, la fermentation alcoolique, opéré par une levure Saccharomyces cerevisiae ( levure de biere ou de boulanger) qui se développe et se nourrit exclusivement  de sucres (glucides) fermentescibles.  Mais ce n’est pas si simple. L’amidon du manioc ne fermente pas spontanément -les indiens d’Amérique du sud  utilisaient  leur salive  dans  une longue mastication-, l’amidon des céréales doit subir un maltage pour libérer son sucre.

Le succès du Vin

Rien de tel pour les sucres de la vigne, tous directement fermentescibles  – glucose, fructose, maltose, saccharose, présents à une teneur élevée dans la grappe. Des techniques simples se diffusent comme dans l’Egypte ancienne ci-dessous. Nakht 8Il suffit de fouler les raisins gorgés de jus dans un récipient étanche pour que la fermentation démarre, et parvienne à  des concentrations élevées d’alcool (jusqu’à 16-17° selon la matière première) . Même si les techniques de vinification se sont au fil du temps complexifiées et perfectionnées, cette simplicité et cette puissance sont sans doute les raisons qui expliquent son succès, au moins dans toutes les parties du monde où le climat le permet.

Ajoutons à ces dispositions naturelles, des  sociétés et des religions qui ont porté le vin à un statut de marqueur civilisationnel : «  Ceci est mon sang » , le sang de la vigne a pris une place éminente dans la liturgie chrétienne, et le vin s’est installé dans tout l’empire romain. Des navires lourdement chargés de milliers d’amphores sillonnaient tout le bassin méditerranéen, on retrouvait le vin romain jusqu’en Rhénanie.chargement amphoresLongtemps cantonné à l’Europe du sud,  le vin a essaimé au cours du XXème siècle  sur les cinq continents. Derrière les trois poids lourds de la viticulture mondiale – la France, l’Italie, l’Espagne – sont apparus des outsiders : Usa, Chine (dans une croissance rapide), Australie, Argentine, Chili … Autant de pays qui ont pris le goût du vin (les USA sont désormais le premier marché mondial) et constituent de nouveaux débouchés pour nos crus. Mais ils savent aussi monter en gamme et venir concurrencer nos produits.production 2012La France dispute la première place à l’Italie : une année l’une, une année l’autre.  Sur le marché international, la viticulture française progresse en valeur mais pas en volume, c’est dire que ce sont ses meilleurs crus qui se vendent le mieux. L’exportation du vin représente un peu moins de 8 milliards d’euros soit la moitié de toutes les exportations de l’agro-alimentaire.

Sur le terrain , la viticulture fait vivre 85 000 exploitations , sans subventions publiques significatives – ce qui en fait une exception dans le paysage agricole français. Les appellations médiocres , les productions de masse peu performantes et de faible qualité sont à la peine, jusqu’à pratiquer l’arrachage. A l’autre extrémité,  les grands crus ne se sont jamais aussi bien portés. Au final, les surfaces cultivées régressent : – 7% entre 2008 et 2012 mais la production en valeur progresse : +16% pour la seule année 2011.

Avec une consommation qui baisse régulièrement en France (-12% entre 2000 et 2012) les acteurs de la filière sont bien conscients que l’avenir des vignerons hexagonaux se joue à l’international.

Alors , notre culture du vin, le soin apporté à sa production, les signes de qualité et un marché de connaisseurs, voilà de bons atouts pour donner une suite positive à notre longue histoire avec le vin.

Pour en savoir plus Rapport 2013 de l’Organisation internationale du Vin

Les autres leçons :

2 – dans la vigne

3-dans la cave

4 – dans nos verres

5 – les vins effervescents

 Et Auvergne  : un vignoble à découvrir

Cinq leçons pour connaître la vigne et le vin … et apprécier les bonnes bouteilles. 2 – Dans les vignes

Depuis le temps où je terminais  mes études d’ingénieur dans la zone viticole Fitou-Corbières-Minervois à arpenter les vignes, établir les essais sur le terrain et suivre les vinifications séparées, de la cave aux jurys de dégustation, j’ai conservé un intérêt constant  pour le monde de la vigne et du vin, bien que jamais à titre professionnel.  Une fois à la retraite j’ai pris l’initiative de partager avec mes proches mes connaissances et mes sensations à propos de ce breuvage qui a accompagné pendant des millénaires la marche en avant de la civilisation occidentale.

Tout le savoir-faire des vignerons commence d’abord dans la vigne. Au fil des siècles, des millénaires, cette plante si particulière a donné lieu à des pratiques culturales à la fois précises et diversifiées.

La pratique de la vigne 

La vigne est une lianeA l’état sauvage elle a de  très longs rameaux. Au printemps, les bourgeons de l’extrémité débourrent les premiers et ralentissent, voire inhibent le développement des bourgeons situés plus bas. C’est ce qu’on appelle la dominance apicale. Cette particularité trouve son fondement dans la nécessité de la vigne sauvage de croitre très rapidement en forêt pour atteindre l’étage ensoleillé de la canopée. A l’inverse, les viticulteurs cherchent à réduire cette exubérance végétative au profit de la formation et de l’alimentation des grappes, d’où l’importance de la taille et de diverses pratiques visant à limiter le développement du feuillage : ébourgeonnage au printemps, écimage, vendanges en vert.

      Une autre caractéristique propre aux lianes, c’est d’être dépendant d’un support auquel elle s’accroche par des vrilles. Dans le vignoble il peut s’agir d’un simple échalas , d’un réseau de piquets et de fils de fer, ou bien de véritables pergolas en hauteur. Parfois la vigne est taillée si près du sol (taille en gobelet) qu’elle trouve son maintien en elle-même.montage conduite vigne
La vigne est une plante pérenne  La durée de vie d’un cep varie de 30 à 60 ans, parfois jusqu’à 100 ans. Au fil des ans le système racinaire met en place une exploitation en profondeur du sol ( entre 2 et 5 m ,Vieux cep jusqu’à 15 m dans les sols très difficiles). Cette longue symbiose avec le sol explique l’impact du substrat (la nature du sol, sa composition, son exposition, le régime hydrique local) sur les caractéristiques et les saveurs du vin. C’est toute l’importance de la notion de terroir sur laquelle est basée la classification des vins et de leurs qualités : les Appellations d’Origine Contrôlée 

   La vigne est adaptée aux climats méditerranéens  doux et humide l’hiver, sec et chaud  l’été. Elle peut supporter le froid jusqu’au moment où les bourgeons floraux apparaissent; les gels de printemps peuvent être destructeurs.  La chaleur et la sécheresse ont pour effet de concentrer les sucres dans le raisin; cependant si le stress hydrique est précoce et prolongé, il peut avoir des effets négatifs sur la vendange. L’irrigation est très répandue dans de nombreux pays dans le monde, en France elle est peu pratiquée et strictement réglementée  irrigation-goutte-a-goutte.    La recherche a montré que l’irrigation n’est pas néfaste à la qualité à la condition expresse de cesser l’arrosage dès la véraison (lorsque les grains prennent de la couleur, autour du 15 août) . En AOC la réglementation l’interdit après le 1er mai . Elle peut être tolérée exceptionnellement en cas de canicule entre le 15 juin et le 15 août.

Les zones méditerranéennes connaissent des climats très variables d’une année sur l’autre, à la différence des zones tropicales ou tempérées. D’où l’importance des millésimes qui traduisent dans les caractéristiques du vin les données climatiques et environnementales de chaque année.

Les ennemis de la vigne :

Le phylloxera .phylloxéra C’est une sorte de puceron ravageur de la vigne qui s’attaque aux feuilles , et, plus grave,  aux racines. La plante ne tarde pas à mourir dans les trois ans qui suivent . Le phylloxera a détruit complètement  le vignoble à partir de 1864. Une vraie catastrophe pour des régions qui ne vivaient que de la vigne. Il a fallu replanter tout le vignoble avec des porte-greffes résistants. Une opération qui a duré des décennies, jusqu’au début du XXème siècle.

Les maladies fongiques dues à des champignons : le  mildiou , l’oïdium, le botrytis. En culture conventionnelle, elles sont combattues par application de fongicides qui sont projetés en aérosol par un système pneumatique.

pulverisateur Les pesticides se retrouvent hélas dans le vin . L’UFC-Quechoisir a trouvé dans un Graves blancs des teneurs en résidus  3 364 fois plus élevée que la norme appliquée à l’eau potable (0,5 μg/kg). Les analyses varient beaucoup avec les échantillons, cela dépend des pratiques culturales des vignerons et des précautions prises  : fréquence, niveau des doses appliquées et dates d’épandage. Les vignes en bio présentent des taux de résidus négligeables – les traitements autorisés sont uniquement  le soufre et la bouillie bordelaise (sulfate de cuivre)

Le raisin n’est pas stockablePeu transportable, il doit être transformé rapidement, donc dans la proximité du vignoble.  Le modèle de l’exploitation viticole intègre généralement une cave où le vigneron traite lui-même en temps réel sa vendange. Chaque vigneron a développé ses méthodes (encadrées cependant par le cahier des charges de l’appellation) et se sent responsable du produit fini et de sa personnalité. Ce sont les arguments avancés par les vignerons indépendants en faveur des caves particulières qui constituent la majeure partie des producteurs en France. Deux exceptions à cette règle : le Champagne qui nécessite  un savoir-faire, des équipements, des caves que les négociants ont su développer – une grande partie de la récolte est donc vendue en l’état aux grandes maisons de négociant  par les vignerons . L’autre exception date à peine d’un siècle, lorsque les viticulteurs de Maraussan dans l’Herault s’unirent pour fonder la première cave coopérative en 1905, en réaction à la grave crise viticole et contre les négociants accusés de fraudes et de spéculation. 800px-Maraussan_la_cave_cooperative

Les coopératives sont maintenant implantées dans tout le territoire, elle vinifient 50% de la production viticole. Avec la montée des exigences de qualité, on leur fait souvent le reproche de mélanger le bon raisin et le moins bon, de gommer les particularités de chaque terroir et une moindre attention au suivi des vinifications, à la différence des vignerons indépendants. Beaucoup d’entre elles ont cependant mis en place des systèmes de notation et des vinifications séparées qui vont dans le sens de l’amélioration de la qualité.

*Les vignes vues du ciel, un joli diaporama sur des photos prises par mes soins  Au-dessus de Quincy et Reuilly

Les autres leçons:

1 – L’invention du vin

 3 – Dans la cave

4 – Dans notre verre

5 – Les vins effervescents

 Et Auvergne  : un vignoble à découvrir

Cinq leçons pour connaître la vigne et le vin … et apprécier les bonnes bouteilles. 3 – Dans la cave

Depuis le temps où je terminais  mes études d’ingénieur dans la zone viticole Fitou-Corbières-Minervois à arpenter les vignes, établir les essais sur le terrain et suivre les vinifications séparées, de la cave aux jurys de dégustation, j’ai conservé un intérêt constant  pour le monde de la vigne et du vin, bien que jamais à titre professionnel.  Une fois à la retraite j’ai pris l’initiative de partager avec mes proches mes connaissances et mes sensations à propos de ce breuvage qui a accompagné pendant des millénaires la marche en avant de la civilisation occidentale.

3-Dans la cave

Les grappes arrivent à maturité. Il faut choisir la date des vendanges! bis-1993C’est un moment difficile pour la décision du vigneron : trop tôt on risque d’avoir des vins verts, trop acides, aux arômes herbacés, avec peu de sucres et partant, peu d’alcool, trop tard c’est s’exposer au Botrytis, la pourriture grise qui n’est pas toujours pourriture noble (comme dans les Sauternes), et à la dégradation des raisins.

Dans les vignes, la vendange s’organise, traditionnellement à la main, parfois grain par grain -c’est l’exception de quelques crus en vendange tardive- mais principalement à la machine qui s’est imposée depuis un vingtaine d’année, surtout pour les blancs, sauf dans les appellations qui l’interdisent. C’est maintenant dans la cave que les enjeux de la réussite se déplacent.

Les levures en action

C’est là que nous retrouvons nos fameuses Saccharomyces cerevisiae. Elles se retrouvent à l’état naturel sous forme de spores dans  l’environnement des grappes ou bien sont introduite par le vigneron (en provenance d’une sélection en laboratoire).

La fermentation alcoolique , c’est leur job :

 

C6H12O6 → 2 C2H5OH + 2 CO2

Pour les chimistes, c’est clair : le sucre c’est  C6H12O6

L’alcool éthylique , (ou éthanol) c’est  C2H5OH

et le gaz carbonique c’est  CO2

Un fois dans le moût riche en sucres fermentescibles, les levures ne produisent pas d’emblée de l’alcool. Tant qu’elles disposent d’oxygène,  elle vont d’abord se multiplier.  Comme tout élément vivant , elles consomment de l’oxygène et produisent du gaz carbonique. C’est  la voie aérobie.  C’est ce qui se passe dans le pétrin du boulanger qui doit aérer longtemps la pâte en la pétrissant pour que les levures de boulangerie (les mêmes Saccharomyces cerevisiae) se multiplient et produisent les fameuses bulles de gaz carbonique qui font lever la pâte.

Mais dans la cuve du vigneron, le gaz carbonique s’accumule, l’oxygène manque. Les levures déclenchent alors le plan B, elle vont trouver leur énergie, en l’absence d’oxygène, en cassant les molécules de glucides dans une réaction qui produit de l’alcool et du gaz carbonique. C’est la voie anaérobie.

Ce mécanisme , il est commun à toutes les vinifications. Mais il se décline en de multiples variations selon la matière première (rouge ou blanc…) et selon le type de vin qu’on cherche à obtenir.

Les vinifications en rouge

De retour de la vigne, les grappes sont triées, éraflées (on écarte la rafle qui est le support ligneux de la grappe) et foulées (les grains de raisins sont éclatés). Avant de passer au pressoir, les rouges vont séjourner un temps plus ou moins long pendant lequel le moût (les peaux du raisins, la pulpe, les pépins) va rester en contact avec le jus, avant la fermentation (c’est le début de la macérationet pendant la fermentation.  Le but de la manoeuvre : laisser les pigments rouges/noirs (les anthocyanes du raisin), les tannins et les arômes migrer vers le jus en fermentation.

Vinification rouge jpg lightLa température joue un rôle important dans la fermentation. Trop froid , en dessous de 10°, elle paralyse les levures. Trop chaud, vers 45-50°, les  levures meurent. La fermentation elle-même produit de la chaleur Ce paramètre, sur lequel les vignerons intervenaient autrefois difficilement, est maintenant contrôlé : la plupart des caves ont des installations de refroidissement.

Les vignerons qui recherchent des vins légers, au caractère fruité en nez et en bouche sont de plus en plus attentifs à conserver les arômes, composants fragiles présents dans le moût qui seraient détruits par une montée en température trop rapide. Beaucoup pratiquent la Macération pré-fermentaire à froid en maintenant les cuves pendant 3 à 5 jours en dessous de 15°, ce qui bloque le démarrage de la fermentation.

A l’inverse une température plus élevée donnera des vins plus charpentés, des vins de garde.

La durée de la fermentation est variable. Elle s’arrête spontanément lorsque les sucres disponibles sont épuisés ou bien lorsque la teneur en alcool dépasse les 15-16° (l’alcool agit comme un poison pour les levures)

Une fois la fermentation achevée, l’extraction du vin se fait en deux étapes :l’écoulage qui consiste à récupérer le vin liquide qui s’écoule. Il est nommé jus de goutte, puis le pressage du marc (résidus solides : peau, pépin, etc.), qui donne le vin de presse plus riche en tannins et plus colorés.

Après assemblage, les vins vont connaître une période de maturation appelée élevage Cette phase qui commence à partir de la fin de la fermentation jusqu’à la mise en bouteilles peut durer de quelques mois à plusieurs années. L’élevage sert à stabiliser le vin et à améliorer ses caractères aromatiques et gustatifs.  Dans ce registre, la fermentation malo-lactique qui intervient de manière spontanée avant l’hiver, contribue à assouplir les vins.tonneaux lightLes vins peuvent ensuite faire un passage en tonneau (le bois – essentiellement le chêne libère des tannins qui améliorent le vin). Une fois stabilisé, éventuellement vieilli, le vin sera mis en bouteille et bouché.

Le délai entre la vendange et la mise en bouteille est variable. Plusieurs années pour les grands crus, plutôt 6 mois en général, il est réduit à moins de trois mois pour les vins primeurs qui subissent des traitements particuliers pour raccourcir la période d’élevage.

Les vinifications en blanc

Autant les vivifications en rouge recherchent les échanges entre le moût et le jus à fermenter, autant les blancs donnent la priorité à la rapidité du pressurage – après le foulage égrappage- , un gage pour conserver intacts les arômes et le fruité des raisins. vinification blanc Depuis les années 1980, les pressoirs pneumatiques ont amélioré le travail en œuvrant à l’abri de l’air et en permettant de piloter finement la pression pour extraire le jus sans abîmer le raisin . Le jus des raisins blancs subit ensuite un débourbage, c’est à dire une séparation des éléments solides qui se déposent au fond de la cuve Les vignerons portent beaucoup d’attention à cette phase car elle détermine la qualité de la matière première livrée à la fermentation. Cette opération qui dure de quelques heures à quelques jours, doit se dérouler à l’abri de l’air et à une température maintenue fraîche ; dans le cas contraire on pourrait avoir une oxydation et un début de fermentation. Le débourbage naturel peut être renforcé par un ajout d’enzyme ou un collage qui accélèrent la précipitation des bourbes.

La fermentation démarre ensuite dans les cuves dont on surveille la température : au-dessus de 18° C , il y a risque de dégrader les arômes produits par le travail des levures.

Pour un vin blanc sec, la fermentation se poursuit jusqu’à épuisement des sucres.

Dans le cas d’un vin doux, la fermentation est arrêtée avant sa fin pour conserver une partie du sucre : c’est le mutage. L’arrêt peut être provoqué par ajout de SO2 (aseptisation du vin), par refroidissement brutal (anesthésie des levures), par filtration stérilisante (capture des levures dans un filtre à maille très fine), par l’ajout d’alcool (« vin doux naturel ») ou par la combinaison de plusieurs de ces méthodes.

Après la fermentation s’ouvre la phase d’élevage plus ou moins longue, sur des vins clarifiés  ou sur lies (les dépouilles des levures).  L’élevage peut comporter un passage en barrique.

Avant la mise en bouteille on cherche à clarifier et stabiliser le vin afin d’éviter les dépôts ultérieurs au fond de la bouteille (tartre), en utilisant le froid ou certains procédés biochimiques.

Les sulfites sont en général présents dans les vins blancs à des doses supérieures à celle des vins rouges, afin de protéger de l’oxydation et du démarrage de phénomènes indésirables dus à des micro-organismes. L’introduction de SO2 est d’autant plus importante que les sucres résiduels sont élevés (vins moelleux ou liquoreux). En production bio le taux de sulfite ne doit pas dépasser 100 milligrammes de sulfites par litre de vin rouge (contre 150 mg/l pour les vins conventionnels), et de 150 mg/l pour les vins blancs et rosés (au lieu de 200 mg/l pour les vins conventionnels).

lLes vinifications en rosé

Le rosé emprunte aux deux types de vinifications que nous avons décrites.

VinificationRosejpgContrairement à certaines légendes (et à certaines velléités des instances européennes), le vin rosé n’est pas issu du mélange de vin blanc et de vin rouge. C’est bien de grappes rouges (quelquefois de rouges très clair comme celles du cépage Cinsault) qu’il est issu. Dans tous les cas , la macération sera absente ou très courte à basse température, pour limiter le passage de la couleur et des tannins. Le pressurage viendra ensuite extraire les jus en limitant au maximum l’oxydation. Mêmes précautions, à l’instar des vins blancs pour conserver , les arômes, le fruité du fruit : débourbage soigneux, fermentation à température modérée, à l’abri de l’oxydation.

A L’origine le vin rosé constituait plutôt un sous-produit de l’élaboration des rouges avec la technique de la saignée. Mais les vins ainsi élaborés présentaient  des défauts: un taux élevé de sucre dans la matière ainsi prélevée qui amenait à un titrage excessif  d’alcool  ou à une présence envahissante de sucres résiduels.

Les producteurs de rosé sont maintenant spécialisés à l’intérieur de zones d’appellation (ex: Rosé de Provence), ils exercent dans des caves très équipées qui réclament un bon niveau de technicité.

Coté consommation, le rosé est à la mode surtout en période estivale. C’est le seul vin dont les ventes progressent chaque année dans l’hexagone.

Les autres leçons :

1- l’invention du vin

2- dans la vigne

4- dans votre verre

5 – Les vins effervescents

Et Auvergne  : un vignoble à découvrir

Cinq leçons pour connaître la vigne et le vin … et apprécier les bonnes bouteilles. 4- Dans notre verre

Depuis le temps où je terminais  mes études d’ingénieur dans la zone viticole Fitou-Corbières-Minervois à arpenter les vignes, établir les essais sur le terrain et suivre les vinifications séparées, de la cave aux jurys de dégustation, j’ai conservé un intérêt constant  pour le monde de la vigne et du vin, bien que jamais à titre professionnel.  Une fois à la retraite j’ai pris l’initiative de partager avec mes proches mes connaissances et mes sensations à propos de ce breuvage qui a accompagné pendant des millénaires la marche en avant de la civilisation occidentale.

Dans notre verre

Ça y est ! La bouteille est sur la table, nous savons maintenant qu’elle est le fruit de multiples soins apportés par le vigneron depuis la plantation de la vigne, jusqu’à la vinification en cave, l’élevage et l’embouteillage. Nous avons l’intuition que les caractéristiques, les qualités du breuvage qui nous est proposé sont en rapport avec les traitement que la vendange a reçu. Pour l’analyser, pour décrire ces caractéristiques organoleptiques nous n’avons que nos sens : la vue, l’odorat , le goût.

Notre premier contact avec le vin est visuelcouleurEn tout premier, c’est le cépage qui va influer sur la couleur du vin; par exemple, les cabernets sauvignons donnent des robes plus intenses que le pinot noir. La robe du vin évolue ensuite avec l’âge. Un vin jeune, rouge violacé, va évoluer vers le rouge orangé, et prendre ensuite des teintes tuilées, tout en perdant de son intensité. Les blancs vont prendre des teintes dorées avec l’âge et les vins liquoreux deviennent ambrés. L’oxydation provoque également un certain brunissement.

nezLa phase olfactive permet de découvrir le nez du vin et les arômes qui le composent. Il faut inspirer une une première fois en laissant le verre immobile, puis une seconde fois, après avoir fait légèrement tourner le vin dans le verre. L’odorat nous renseigne sur le taux d’alcool , et surtout sur  les arômes . Il peut nous alerter sur des défauts : acidité acétique ( vinaigre), goût de bouchon … Le repérage des arômes est complété par la sensation en bouche , précisément avec le phénomène de rétro-olfaction qui stimule les récepteurs olfactifs de l’arrière-nez.

La phase gustative vous renseignera définitivement sur le vin. En introduisant une petite quantité de vin afin de permettre sa diffusion dans la totalité de l’espace buccal, en aspirant un peu d’air pour brasser le contenu  et  remonter ainsi les composés volatils jusqu’aux fosses nasales puis en repérant, après la déglutition, la persistance en bouche.

Comment classer nos sensations?

·       Le sucre : C’est la saveur la plus primitive (appréciée dès les premiers jours de la vie d’un nourrisson). La sensation sucrée est amplifiée par l’alcool. Par conséquent, un vin au titre alcoolique plus élevé nous paraîtra plus sucré. Le sucré donne à la fois des éléments de souplesse, de gras et moelleux.

·         L’alcool : PiquetteLe temps n’est plus où l’on trouvait quelque sympathique «piquette», aux teintes violacées, titrant au grand maximum 10°, en général mal vinifiée, dont la conservation était très aléatoire. La légende voulait qu’elle fasse des centenaires ….- sauf cirrhose et autre ulcère d’estomac-.   Depuis,  un taux d’alcool d’au moins 12° est devenu la norme, un taux supérieur apparaissant comme un gage de qualité et de conservation en vue de la garde. Les taux élevés dépendent de l’exposition, se retrouvent plutôt dans la viticulture méridionale et sur des cépages comme le grenache et le muscat.

·         L’Acidité : ça peut être un défaut , lorsque la bactérie du vinaigre « aceto-bacter », stimulée par la présence d’oxygène dans le cas d’une mauvaise conservation, produit de l’acide acétique. A l’inverse, l’acidité peut être naturelle, en provenance de la grappe elle-même (acide malique, tartrique, citrique…). Dans ce cas, elle confère de la légèreté et de la vivacité aux vins (particulièrement les blancs). Une acidité trop élevée peut être la marque d’une vendange trop précoce, sur des raisins trop verts.
·   Les-Demoiselles-Tatin  L’astringence : ce n’est pas une saveur mais une sensation physique dans la bouche – L’astringence provoque l’assèchement de la bouche et des gencives ainsi qu’une impression de rugosité (langue râpeuse). Elle provient de la propriété qu’ont les protéines à se complexer sous l’effet des tanins (polyphénols), surtout présents dans les vins rouges. L’amylase salivaire est une protéine qui réagit fortement avec les composés astringents et provoque cette sensation d’assèchement dans la bouche.Les tanins sont présents dans tous les vins rouges, à des doses très variables : très taniques : les vins du sud-Ouest (les Cahors à base de Malbec) . Peu taniques ( les beaujolais à base de Gamay, Les rouges de Centre Loire: Reuilly ci-contre). La vinification , et notamment la durée de macération influent beaucoup sur la présence des tanins. Le vieillissement modifie et adoucit les tanins.
L’Amertume :Dans le vin, une légère amertume ajoute à la complexité et à la persistance gustative. Toutefois, une trop grande amertume est considérée comme un défaut. Elle provient généralement des pépins de raisins dans le cas d’une extraction trop forte au pressurage.
Les arômes  :    Ils se perçoivent à la fois par le nez et l’arrière-bouche. Ce sont vraiment les marqueurs d’un cru, de sa personnalité et de son expression. On les classe en trois catégories selon leur origine. Les arômes primaires sont déjà présents dans le raisin ( exemple: le muscat) . Les secondaires sont produits par les levures pendant la fermentation ( ex: banane, ananas…). Les arômes tertiaires apparaissent pendant l’élevage (Tanins du chêne des barriques, ou micro-oxydation du vin)affiche-aromes-du-vin-2L’équilibre d’un vin : Pour un rouge il faut tenir compte de trois paramètres : acidité, alcool , structure tanique. Pour un blanc ce sont deux paramètres : l’acidité et l’alcool, avec la variante du sucre pour les demi-secs ou les liquoreux.

La structure du vin : La structure d’un vin rouge lui est apportée par ses tannins, c’est l’ossature du vin. L’intensité de la couleur annonce aussi la structure du vin. Pour les vins rouges, une couleur profonde présage en général un vin plutôt corsé, riche en tannins tandis qu’une couleur faible suggère un vin léger. Ainsi, plus un vin rouge est structuré plus sa propension à bien vieillir est prometteuse.

Alors, prêts pour la dégustation ? La priorité à vos sensations. Partir d’elles puis essayer de leur donner un nom, un qualificatif (et pas l’inverse).

Vous vous sentez un peu perdu(e)  dans le vocabulaire foisonnant et complexe des dégustateurs ?

Rassurez-vous, vous n’êtes pas seuls : Un sondage réalisé en 2013 révèle que les consommateurs n’apprécient pas le langage suranné voire prétentieux des notes de dégustation : 55% des sondés déclarent que les descripteurs utilisés par les dégustateurs professionnels ne les aident pas à comprendre le goût du vin, deux tiers d’entre eux considèrent que les descriptions mentionnées sur la contre-étiquette ne correspondent pas à leur propre analyse sensorielle, 91 % d’entre eux affirment ne pas consulter les critiques spécialisées avant de choisir un vinPrécision : il s’agit d’un sondage auprès d’un public de 1 000 consommateurs britaniques réalisé en ligne par One Pollet publié par le Télégraph

Alors, fiez-vous à vos sens ! A votre Santé !

Les autres leçons :

1 – L’invention du vin

2 – Dans la vigne

3 – Dans la cave

5 – Les vins effervescents  

 Et Auvergne  : un vignoble à découvrir

 

Cinq leçons pour connaître la vigne et le vin … et apprécier les bonnes bouteilles. 5- Les vins effervescents

Depuis le temps où je terminais  mes études d’ingénieur dans la zone viticole Fitou-Corbières-Minervois à arpenter les vignes, établir les essais sur le terrain et suivre les vinifications séparées, de la cave aux jurys de dégustation, j’ai conservé un intérêt constant  pour le monde de la vigne et du vin, bien que jamais à titre professionnel.  Une fois à la retraite j’ai pris l’initiative de partager avec mes proches mes connaissances et mes sensations à propos de ce breuvage qui a accompagné pendant des millénaires la marche en avant de la civilisation occidentale.

 Les vins effervescents

L’effervescence est un phénomène naturel qu’ont toujours connu les vignerons lorsque, au printemps les vins de l’automne précédent se mettaient à fermenter de nouveau et à prendre de la mousse.bouchon-de-champagne L’histoire des vins effervescents retrace les efforts des cavistes à domestiquer ce phénomène indésirable et à le transformer en avantage incomparable. Cette maîtrise ne s’est développé qu’avec l’apparition de procédés industriels de fabrication de bouteille en verre (et particulièrement de récipients suffisamment solides pour tolérer les pressions importantes des effervescents ), et avec la généralisation du bouchon de liège maintenu par un muselet – donc pas vraiment avant le milieu du  XVIIIème siècle. Ensuite c’est tout le savoir-faire des vignerons et des premières maisons de négoce qui a forgé la méthode champenoise. Depuis les coteaux de la Champagne, elle a essaimé ensuite dans toutes les régions viticoles de France, puis à la surface de la planète.

Méthode traditionnelle, méthode ancestrale, méthode champenoise… il y a plusieurs façon de faire des vins effervescents, mais certaines étapes sont communes à toutes ses méthodes.

(Cliquer sur le schéma pour l’afficher en grand)Schéma vinifcation vin effervescent

La méthode champenoise  

la méthode traditionnelle de production des vins mousseux qui en Champagne seulement a le droit de porter la mention « méthode champenoise » est également la plus longue et la plus onéreuse.

  •        Le vin « tranquille » est élaboré (c’est la première fermentation) à partir de raisins provenant de la zone d’appellation, issus de Pinot noir (raisins noirs à jus blanc), de Pinot meunier (noir à jus blanc) et de Chardonnay (blancs). On trouve aussi des rosés provenant soit de mélange de blanc et de rouge, soit de pinot noir macéré un certain temps avec le moût. Les « blancs de blancs » sont issus exclusivement de chardonnay.
  •        Premier embouteillage :   Un mélange de sucre et de levures, appelé liqueur de tirage, est ajouté au vin d’assemblage, ou vin de base, qui est ensuite embouteillé. Les bouteilles sont alors bouchées à l’aide d’une capsule-couronne provisoire. Une seconde fermentation alcoolique, appelée prise de mousse, se produit dans la bouteille. Le processus de fermentation génère du gaz carbonique qui, sous la pression, se dissout dans le vin et créera les fameuses bulles.
  •      Vieillissement et remuage : À la suite de cette deuxième fermentation, le vin est vieilli en bouteille sur les lies de levure, ce qui lui donne davantage de caractère. La durée du stockage sur lies, ou vieillissement, varie selon le style et la qualité recherchés (18 mois pour les brut sans année à 3 ans pour les millésimés  et bien plus pour les champagnes d’exception …). Finalement, les lies sont retirées de la bouteille au moyen d’un procédé connu sous le nom de remuage. À l’origine, il fallait plusieurs semaines pour remuer la bouteille afin d’amener les lies collantes jusque dans le goulot, mais la mécanisation du procédé a réduit cette durée à une dizaine de jours.
  •     Deuxième embouteillage : Il s’agit d’éliminer ce dépôt par une pratique qui s’appelle le dégorgement. Le col de la bouteille inclinée est congelé, la capsule est retirée et les lies sont éjectées. Une petite dose de vin permettant une compensation du niveau et un ajustement final de la teneur en sucre est ajoutée, puis bouchon, muselet et capsule de surbouchage sont mis en place (la pression dans la bouteille : 4,07 à 6,07 atmosphères). La dose de sucre varie selon les caractéristiques du produit : Brut pas  plus de 15 g de sucre (de canne de préférence ou de concentré de vin ) par litre. Sec : 17 à 35 g/litre. Demi-sec : de 33 à 50 g/litre. Doux : plus de 50 g/litre.

La notion de marque, primordiale en Champagne, n’est pas en cohérence avec la notion de terroir habituellement consacrée dans la définition des appellations en France. Elle a pour effet de gommer systématiquement les particularités de chaque terroir. Elle a cependant l’avantage d’assurer la garantie, pour le consommateur, de retrouver un gout constant résultant de l’assemblage minutieux de vins de zones de production et de millésimes différents.

Sur les 324 crus (qui correspondent aux territoires des communes) que compte l’appellation, seuls 17 ont droit à l’appellation Grand Cru et 43 à celle de premier cru.

Quelques vignerons ont pris le parti de s’affranchir de la pratique de l’assemblage et recherchent ainsi le maximum d’expression du terroir.

Le territoire de l’appellation est très vaste et composite :

(Cliquer sur le schéma pour l’afficher en grand)

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Les différents crus du champagne

bouteilles Les champagnes sont classés par rapport à la provenance des raisins, à leur sélection et au traitement qu’ils subissent en cave.

 

  • Brut sans année (BSA) Il s’agit d’un champagne élaboré à partir de cépages, d’années et de régions différentes pour maintenir le goût typique de la marque aussi constant que possible. Mêlant en général un tiers de chardonnay, un tiers de pinot noir et un tiers de pinot meunier, il est élevé 18 mois en cave avant d’être mis en vente.
  • Champagne millésimé Composé exclusivement de raisins d’une même année, il combine les cépages et les régions, et doit avoir vieilli au moins trois ans en cave. Son goût peut donc varier d’un millésime à l’autre. Selon les marques, seules les bonnes années sont millésimées.
  • Grand cru Champagne provenant des seules communes classées à 100 %, celles qui possèdent les meilleurs terroirs.
  • Premier cru Champagne provenant de communes dont le classement est compris entre 90 et 99 %.
  • Cuvée spéciale, Brut réservé, Brut premier, Grande réserve : Ces mentions n’ont aucune signification réglementaire. Elles correspondent à une démarche purement commerciale des grandes maisons.
  • Blanc de blancs Champagne élaboré exclusivement à partir de raisins de cépage chardonnay (raisin blanc à jus blanc). Le goût est généralement plus fin et le prix plus élevé.
  • Blanc de noirs Champagne blanc, plus charpenté, issu de raisins noirs à jus blanc (pinot noir et pinot meunier).
  • Champagne rosé Il s’obtient en ajoutant à du champagne ordinaire un vin rouge de la région (en général le Bouzy), ou en laissant macérer un temps la peau des pinots lors de la vinification.
  • Brut, sec ou demi-sec Presque tous les champagnes sont bruts. Pour mériter cette appellation, ils ne doivent pas contenir plus de 15 g de sucre (de canne de préférence ou de vin vieux) par litre. Les proportions sont de 17 à 35 g/litre pour le sec et de 33 à 50 g/litre pour le demi-sec. Un champagne doux en contiendra plus de 50 g/litre.

 

Savoir lire les étiquettes

 

bouteillesLe champagne est le seul vin AOC pour lequel la mention d’appellation d’origine n’est pas obligatoire. En revanche, l’étiquette doit indiquer la raison sociale de l’élaborateur (c’est-à-dire celui qui effectue la prise de mousse ou, au minimum, le dégorgement) et son statut. Il peut produire lui-même ses raisins ou les acheter à un producteur situé dans l’appellation.

RM. Récoltant-manipulant. Vigneron qui cultive ses vignes, vinifie sa récolte et élabore lui-même son champagne. Il l’embouteille sous son propre nom ou sa propre marque

RC. Récoltant-coopérateur. Viticulteur qui confie ses raisins à la coopérative et les récupère après la seconde fermentation en bouteille. Il commercialise ensuite ses champagnes sous son nom ou celui de sa marque.

NM. Négociant-manipulant. Société qui achète des raisins  à des vignerons, les vinifie et élabore son champagne à partir de cette matière première. Dans certains cas achète les bouteilles sur lattes avant vieillissement et remuage.

CM. Coopérative de manipulation. C’est une cave à laquelle les adhérents apportent leurs raisins. Elle se charge de les presser, de les vinifier puis d’élaborer les assemblages. Tout ou partie de ces bouteilles peut être vendu sous le nom de la coopérative ou une marque commune

SR. Société de récoltants. Groupement de producteurs qui commercialisent souvent sous une marque commune.

MA. Marque d’acheteur. Marque de détaillant qui commercialise un champagne dont il n’est pas l’élaborateur

 

Choisir son champagne

bouteillesBrut sans année, millésime, champagnes de marque ou de producteurs , vous avez compris que le monde du Champagne est complexe (Il existe aujourd’hui 284 maisons de négoce auxquelles il faut rajouter les 43 coopératives et les 4722 producteurs indépendants). Alors pour se retrouver dans cette jungle sans vider votre compte en banque, faites confiance aux guides des vins : Parker , Hachette, Gault et Millau…

 

Les autres méthodes

 

      La méthode de la clairette de Die,  du Diois img_clairette_de_die

et de la vallée de la Drôme. Elaborée à partir de muscat (au moins 75%)et de Clairette blanche. La première fermentation-en cuve- est arrêtée par le froid. on ne rajoute pas de sucre. La seconde fermentation s’effectue en bouteille à basse température. Après la prise de mousse, au bout de quatre mois minimum, on vidange les bouteilles à froid et sous pression, pour effectuer une filtration des levures . Entretemps les bouteilles ont été rincées et sont prêtes à recevoir à nouveau leur contenu, toujours sous pression. Il n’y a ainsi aucune perte du gaz d’origine. Le taux d’alcool est de 7 à 9 °. L’étiquette porte la mention « Tradition »

On trouve aussi des Clairettes élaborées selon la méthode champenoise. Elles sont signalées comme « Brut » sur l’étiquette.   

 

La méthode de la cuve close

La prise de mousse, après apport de sucre et de levure, ne se réalise pas en bouteille mais dans une cuve sous pression.

elaboration_cuve_close_1

Pour compenser la perte de dioxyde de carbone naturel pendant la mise en bouteille l’ajout de CO2 alimentaire est autorisé. Cette méthode est utilisée pour fabriquer les SEKT allemands ( les allemands sont de gros consommateurs et de gros producteurs – principalement à base de vins importés- de vins effervescents) et tchèques, les vins sardes , des cidres et les prosecco…. Elle est également appelée méthode italienne en Italie.

Les crémants

de Bourgogne, d’Alsace, de Touraine, de Loire…) sont des vins effervescents mousseux obtenus par méthode traditionnelle (alias « méthode champenoise » en Champagne) dans une aire d’appellation particulière. Même procédé que le Champagne mais n’ont pas le droit à l’appellation « Champagne»

 

la blanquette de Limoux

dite brute est obtenue selon la méthode traditionnelle «champenoise ». Pour la blanquette de Limoux dite méthode ancestrale  la fermentation est entièrement naturelle dans la bouteille sans transvasement. Le cépage est principalement le Mauzac. Le taux d’alcool est autour de 7°.

 

Les bulles : un succès universel

 Depuis l’époque où dom Pérignon (un moine bénédictin de l’abbaye d’Hautvillers) a importé de Limoux  la méthode de la prise de mousse du vin et l’a adaptée sous le label « méthode champenoise », les vins effervescents ont conquis les moments de fête . En 2012 ce sont 2,5 milliards de bouteilles qui ont été consommées aux quatre coins de la planète dont près de 50% de champagne !

Pour finir, je vais vous faire une confidence : Je n’aime pas le Champagne, surtout certaines bouteilles aux bulles grossières et agressives, sur la base d’un vin clairet et toujours un peu acide. En revanche une petit Clairette, simple et fruitée me fera plaisir, au coeur de l’été !

Et puis on attend l’effervescent que nous promet Jean, notre ami viticulteur en attendant que sa vigne pousse et porte sa première vendange!

 

A Votre Santé !barLes autres leçons :

1 – L’invention du vin

2 – Dans la vigne

3 – Dans la cave

4 – Dans notre verre

 Et Auvergne  : un vignoble à découvrir

Les vignes vues du ciel

Lorsque Jean, mon ami viticulteur, m’a sollicité pour un inventaire photographique du vignoble de Quincy et Reuilly, je me suis trouvé assez perplexe. Il existe des entreprises spécialisées qui offrent des garanties de moyens et de résultats bien au-dessus des possibilités d’un photographe amateur, fût-il expérimenté.

Mais le défi me tentait et l’idée d’opérer pour des vignerons et un vignoble que je connaissais et appréciais depuis longtemps à travers les vendanges ( voir ici  ou ), rendez-vous annuel d’une bande sympathique autour de Chantal et Jean.

Alors on trouva un ULM, on prit un rendez-vous et l’affaire se concrétisa.

Pour moi l’expérience en vol est une première complète . Il s’agit d’abord de prendre connaissance avec l’appareil, un ULM pendulaire, deux places, assez évolué. La place du passager est étroite, comparable au siège arrière d’une moto, la ceinture de sécurité en plus. Pas question d’amener du matériel ou des documents. Pas question de changer d’objectif en vol. Alors lequel choisir?

Pour ce premier vol je choisis un zoom 70-300mm dans l’idée qu’à 150 m d’altitude il vaut mieux se rapprocher de son sujet, effet amplifié par la taille du capteur APS de mon Canon 600d.

L’objectif se révèle très adapté à viser des éléments du paysage , comme le chateau de Quincy (ci-dessus) mais pas du tout à saisir de vastes parcelles de vigne, des ensembles de parcelles ou des paysages. Bref après un petit tour, nous revenons vers la base pour installer un petit zoom 18-55 mm mieux adapté et moins encombrant. Idéal pour ce genre de panorama ( les éoliennes au-dessus de Sainte-Thorette) :L’expérience visuelle est pour moi inédite. Rien de comparable au point de vue terrestre. Vu d’en haut, le paysage apparaît enfin dans sa globalité et dans sa diversité  : ainsi on comprend que ces terroirs de vignobles sont enchassés dans des surfaces de grandes cultures ( très visibles à cette époque de l’année car le sol, retourné et préparé pour les semis d’automne se détache en étendues beiges claires ou brun foncé). La forêt est très présente, massive, sombre, même si le remembrement a supprimé la plupart des haies et des bosquets.Et puis on prend conscience de la place de l’eau dans cette zone baignée par deux rivières : l’Arnon et le Cher et parsemée de nombreuses gravières créées par l’homme, transformées en autant d’étangs recolonisés par la végétation.Dans cette zone de plaine, le relief apparaît comme une variable importante dans le paysage. Ainsi les coteaux de l’Arnon sont bien plus découpés et pentus que les terrasses du cher. On observe en conséquence sur le vignoble de Reuilly , de vastes ondulations avec des pentes importantes.L’initiative des vignerons s’inscrivait dans une approche terroir , menée en collaboration avec l’INRA d’Angers .

La notion de terroir est familière – mais un peu vague- dans l’agriculture française. Avec cette étude, il s’agit donc d’examiner de plus près , au niveau de la parcelle ou d’un ensemble de parcelles les éléments (le sol d’abord, mais aussi l’orientation,le microclimat, le voisinage, la pente et les pratiques culturales) qui conditionnent la qualité du produit. Et la photo peut amener des informations précieuses.Ainsi cette vue de la Commanderie au sud de Preuilly ( la parcelle en long au centre qui culmine autour de l’éolienne anti-gel) a retenu l’attention de Jean. On observe que les rangs inférieurs et plus à droite sont d’un vert plus sombre qu’ailleurs , signe d’une vigueur végétative supérieure. c’est aussi une zone où le botrytis ( pourriture grise des grappes) est plus fréquent, donnant ainsi des indications utiles sur la conduite de la fertilisation.

C’est pourquoi nous nous sommes efforcés de photographier chaque parcelle. Mais lorsqu’il a accès à de tels points de vue, le photographe se laisse aussi fasciner par la magie graphique de ces paysages très travaillés. Sans oublier la ponctuation de ces fermes isolées qui sont autant d’ilots d’histoire et d’humanité parsemées dans l’océan des grandes cultures d’aujourd’hui. Alors, si la photographie -et la curiosité de l’amateur- peut se révéler utile aux producteurs, ne boudons pas notre plaisir !

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