Depuis le temps où je terminais mes études d’ingénieur dans la zone viticole Fitou-Corbières-Minervois à arpenter les vignes, établir les essais sur le terrain et suivre les vinifications séparées, de la cave aux jurys de dégustation, j’ai conservé un intérêt constant pour le monde de la vigne et du vin, bien que jamais à titre professionnel. Une fois à la retraite j’ai pris l’initiative de partager avec mes proches mes connaissances et mes sensations à propos de ce breuvage qui a accompagné pendant des millénaires la marche en avant de la civilisation occidentale.
Tout le savoir-faire des vignerons commence d’abord dans la vigne. Au fil des siècles, des millénaires, cette plante si particulière a donné lieu à des pratiques culturales à la fois précises et diversifiées.
La pratique de la vigne
La vigne est une liane –A l’état sauvage elle a de très longs rameaux. Au printemps, les bourgeons de l’extrémité débourrent les premiers et ralentissent, voire inhibent le développement des bourgeons situés plus bas. C’est ce qu’on appelle la dominance apicale. Cette particularité trouve son fondement dans la nécessité de la vigne sauvage de croitre très rapidement en forêt pour atteindre l’étage ensoleillé de la canopée. A l’inverse, les viticulteurs cherchent à réduire cette exubérance végétative au profit de la formation et de l’alimentation des grappes, d’où l’importance de la taille et de diverses pratiques visant à limiter le développement du feuillage : ébourgeonnage au printemps, écimage, vendanges en vert.
Une autre caractéristique propre aux lianes, c’est d’être dépendant d’un support auquel elle s’accroche par des vrilles. Dans le vignoble il peut s’agir d’un simple échalas , d’un réseau de piquets et de fils de fer, ou bien de véritables pergolas en hauteur. Parfois la vigne est taillée si près du sol (taille en gobelet) qu’elle trouve son maintien en elle-même.
La vigne est une plante pérenne La durée de vie d’un cep varie de 30 à 60 ans, parfois jusqu’à 100 ans. Au fil des ans le système racinaire met en place une exploitation en profondeur du sol ( entre 2 et 5 m , jusqu’à 15 m dans les sols très difficiles). Cette longue symbiose avec le sol explique l’impact du substrat (la nature du sol, sa composition, son exposition, le régime hydrique local) sur les caractéristiques et les saveurs du vin. C’est toute l’importance de la notion de terroir sur laquelle est basée la classification des vins et de leurs qualités : les Appellations d’Origine Contrôlée
La vigne est adaptée aux climats méditerranéens doux et humide l’hiver, sec et chaud l’été. Elle peut supporter le froid jusqu’au moment où les bourgeons floraux apparaissent; les gels de printemps peuvent être destructeurs. La chaleur et la sécheresse ont pour effet de concentrer les sucres dans le raisin; cependant si le stress hydrique est précoce et prolongé, il peut avoir des effets négatifs sur la vendange. L’irrigation est très répandue dans de nombreux pays dans le monde, en France elle est peu pratiquée et strictement réglementée . La recherche a montré que l’irrigation n’est pas néfaste à la qualité à la condition expresse de cesser l’arrosage dès la véraison (lorsque les grains prennent de la couleur, autour du 15 août) . En AOC la réglementation l’interdit après le 1er mai . Elle peut être tolérée exceptionnellement en cas de canicule entre le 15 juin et le 15 août.
Les zones méditerranéennes connaissent des climats très variables d’une année sur l’autre, à la différence des zones tropicales ou tempérées. D’où l’importance des millésimes qui traduisent dans les caractéristiques du vin les données climatiques et environnementales de chaque année.
Les ennemis de la vigne :
– Le phylloxera . C’est une sorte de puceron ravageur de la vigne qui s’attaque aux feuilles , et, plus grave, aux racines. La plante ne tarde pas à mourir dans les trois ans qui suivent . Le phylloxera a détruit complètement le vignoble à partir de 1864. Une vraie catastrophe pour des régions qui ne vivaient que de la vigne. Il a fallu replanter tout le vignoble avec des porte-greffes résistants. Une opération qui a duré des décennies, jusqu’au début du XXème siècle.
– Les maladies fongiques dues à des champignons : le mildiou , l’oïdium, le botrytis. En culture conventionnelle, elles sont combattues par application de fongicides qui sont projetés en aérosol par un système pneumatique.
Les pesticides se retrouvent hélas dans le vin . L’UFC-Quechoisir a trouvé dans un Graves blancs des teneurs en résidus 3 364 fois plus élevée que la norme appliquée à l’eau potable (0,5 μg/kg). Les analyses varient beaucoup avec les échantillons, cela dépend des pratiques culturales des vignerons et des précautions prises : fréquence, niveau des doses appliquées et dates d’épandage. Les vignes en bio présentent des taux de résidus négligeables – les traitements autorisés sont uniquement le soufre et la bouillie bordelaise (sulfate de cuivre)
Le raisin n’est pas stockable. Peu transportable, il doit être transformé rapidement, donc dans la proximité du vignoble. Le modèle de l’exploitation viticole intègre généralement une cave où le vigneron traite lui-même en temps réel sa vendange. Chaque vigneron a développé ses méthodes (encadrées cependant par le cahier des charges de l’appellation) et se sent responsable du produit fini et de sa personnalité. Ce sont les arguments avancés par les vignerons indépendants en faveur des caves particulières qui constituent la majeure partie des producteurs en France. Deux exceptions à cette règle : le Champagne qui nécessite un savoir-faire, des équipements, des caves que les négociants ont su développer – une grande partie de la récolte est donc vendue en l’état aux grandes maisons de négociant par les vignerons . L’autre exception date à peine d’un siècle, lorsque les viticulteurs de Maraussan dans l’Herault s’unirent pour fonder la première cave coopérative en 1905, en réaction à la grave crise viticole et contre les négociants accusés de fraudes et de spéculation.
Les coopératives sont maintenant implantées dans tout le territoire, elle vinifient 50% de la production viticole. Avec la montée des exigences de qualité, on leur fait souvent le reproche de mélanger le bon raisin et le moins bon, de gommer les particularités de chaque terroir et une moindre attention au suivi des vinifications, à la différence des vignerons indépendants. Beaucoup d’entre elles ont cependant mis en place des systèmes de notation et des vinifications séparées qui vont dans le sens de l’amélioration de la qualité.
*Les vignes vues du ciel, un joli diaporama sur des photos prises par mes soins Au-dessus de Quincy et Reuilly
Les autres leçons:
Je regrette que le mode de fructification particulier de la vigne ,comme par exemple la floraison,la naissance du fruit et les différentes étapes jusqu’aux raisins ne soit pas abordé,
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