Les prévisions météo l’annonçaient sans conteste : plusieurs jours de grand beau temps autour de la Toussaint, en particulier dans le sud. Une bonne raison pour sortir le camping-car avant l’hivernage, à laquelle j’ajoutais une envie de redécouvrir cette petite ville du sud qui m’avait vu naître en 1948 et que j’avais quitté à l’âge de 15 ans.
En bon camping-cariste, une première question s’impose à moi : où vais-je pouvoir stationner mon engin ? Comme dans toute zone touristique, la municipalité cherche à limiter les possibilités de stationnement. Heureusement, Sète propose une aire pour Camping-car bien aménagée, à 30 m de la plage, immense qui s’étend entre Sète et Agde. L’inconvénient c’est qu’on se trouve à 7-8 km du centre-ville. La solution, c’est le vélo sur la voie verte qui nous amène vers l’agglomération.je suis installé au milieu de familles en vadrouille, de cyclistes randonneurs et de pécheurs assidus qu’on voit tard dans la journée auprès de leurs cannes.
Le soir tombe sur notre bivouac, nous sommes sur une bande de sable, un cordon littoral étroit qui sépare le bassin de Thau au Nord, de la Méditerranée au sud. D’énormes travaux ont rendu à la plage menacée de disparition son étendue de jadis. Derrière : les parkings, la route, la voie ferrée, les vignes et partout ces rangées de cannes de Provence.
Dès le matin, me voici sur le vélo prêt à mon expédition. D’abord un petit tour au domaine de Listel , un km plus loin. Ces vignes appartenaient aux Salins du Midi, elles avaient connu une grande prospérité au début du XXème siècle lorsque les vignobles crevaient tous du phylloxéra. on s’était aperçu que le phylloxéra ne se développait pas dans les sols sableux. Depuis Listel s’est fait une spécialité de vins faciles, légers, rouges, rosés ou gris – le vin des sables qu’on retrouve aussi en Camargue. La particularité des plantations est géométrique : la longueur des rangs se compte ici en km !
Direction La Corniche,le quartier touristique qui ouvre sur les plages, jadis quelques hôtels, 2-3 immeubles, une maison de retraite, aujourd’hui marinas, port de plaisance, résidences de vacances , promenades aménagées… Bref ce quartier s’est terriblement modernisé à partir des années 1980. Inutile pour moi de chercher la clinique où je vis le jour, elle a disparu depuis belle lurette au profit des résidences avec vue sur mer.
Heureusement, un peu plus loin, je retrouve inchangée la baignade où nous avions nos habitudes. La crique de La Nau attire les courageux qui profitent de ce temps estival.
En avançant on aborde la Sète ancienne, bâtie autour de son port au pied du Mont Saint-Clair. Nous habitions un peu plus loin, ancienne route d’Agde, aujourd’hui baptisée rue Jean Vilar (il y avait sa maison de famille), la Villa « Les Embruns » qui méritait totalement son nom lorsque les tempêtes d’automne nous envoyaient des paquets de houle qui traversaient la route du bord de mer. Mais nous étions aux premières loges dès que le soleil réchauffait l’eau pour piquer une tête depuis les rochers ou observer le manège des voiles qui gagnaient le large.
Rien n’a changé dans cet ancien quartier résidentiel. La fraîcheur des pins au bout d’allées ombragées, des entrées modestes, une grille rouillée.
Pour avoir une vue complète de la ville, il faut monter au Mont Saint-clair, 180 m de dénivelé. on voit que la ville d’origine s’est construite, à partir de 1660, autour des canaux pour créer un débouché au canal du Midi qui arrive dans l’étang de Thau.
La route descend jusqu’au port. Sur le chemin, je m’arrête au cimetière marin, comme beaucoup de sétois en préparation du 1er novembre et je répare une omission : tout le temps de mes jeunes années vécues tout à coté du cimetière, je n’avais jamais eu la curiosité de visiter la tombe de Paul Valéry, relativement discrète au regard de bien de ses voisines et surtout signalée comme le caveau de la famille Grassi du nom de son grand’père maternel Giulio « il cavaliere Grassi Console di SM il Re d’Italia » consul d’Italie.
…Ô récompense après une pensée
Qu’un long regard sur le calme des dieux !
C’est en hommage à ce fameux poème que le cimetière autrefois Saint-Charles fut dénommé « Cimetière marin ».
Inutile de chercher Georges Brassens dans cette situation d’exception -la plus belle vue sur le port-; celui-ci est enterré au cimetière du Py, coté étang de thau, le cimetière des sétois ordinaires.
Tous les chemins nous conduisent au port, le centre névralgique de Sète. Il vaudrait mieux parler « des » ports de Sète. Derrière le môle que je parcours, se sont installés les plaisanciers. Plus loin , le long du quai de la Marine ce sont les pêcheurs avec les immenses chalutiers qui en font le premier port de pêche en méditerranée. On est loin des « bateaux boeufs » de mon enfance construits en bois sur place. A l’autre bout s’ouvrent les bassins du port commercial. Autrefois spécialisée dans le commerce du vin avec le Magrheb, l’activité s’est diversifiée. Une liaison régulière de ferrys avec le Maroc et une étape prisée pour les croisiéristes dont on aperçoit les immenses navires depuis le quartier haut, le quartier des pécheurs.
Ce quartier Haut – que je traversais tous les jours pour aller au Lycée Paul Valéry- n’a pas beaucoup changé, même si les façades des petits immeubles sont plus coquettes que jadis. Au bout de la rue Villaret Joyeuse qui domine directement le port de pêche, s’élève l’Eglise décanale (doyenne) Saint-Louis, sans doute la dernière que j’ai fréquentée dans une vie désormais athée.
Sète dans mon enfance était une ville de gens modestes, voire pauvres, à part un tout petit noyau de riches. Les habitants étaient pécheurs, marins, dockers, employés dans les entreprises de négoce du vin, ouvriers de la cimenterie ou de la pétrochimie de Frontignan. On votait naturellement communiste. Le tourisme -plutôt relégué dans les campings de bord de plage- pesait peu sur l’économie et l’urbanisme de la ville. Juste des revenus complémentaires pour les sétois qui louaient un petit meublé quelques semaines par an. C’est sans doute une particularité si l’on compare aux autres villes côtières. Dans mon souvenir, elle était juste une petite ville de province- une belle endormie.
Aujourd’hui les sétois ne sont guère plus riches (25% de pauvreté contre 14% au niveau national), le chômage est élevé (22% contre 9,9%) mais le tourisme a profondément marqué la ville avec les aménagements de la Corniche, la multiplication des résidences de tourisme et même un casino !
Mais avec l’éternelle vedette des lieux : la mer le long des plages sans fin, la mer au pied des rochers, la mer à l’entrée du port…A signaler , au milieu d’une riche activité culturelle, ImageSingulières organise un festival annuel de photographie documentaire : Du 24 mai au 11 juin 2017
salut Norbert
Toujours aussi juste dans le ton du récit et les photos inédites !
J’aime beaucoup Sète , ou j’ai souvent flané avec émotion , car cette ville , le port et les plages ressemblent tellement à BEJAIA ma ville natale de petite Kabylie !!!
Je t’embrasse , prends soin de toi !
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Oui , un reportage sensible et informatif sur la ville où j ‘ai également vécu jusqu ‘à mes 18 ans ……en plus des belles photos ….Décidément , il faut que j ‘y revienne !
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Un seul regret : mon séjour s’est limité à 48 h , retour imposé pour faire soigner la patte de mon chien.
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Quel beau temps pour un mois d’octobre ! De belles photos très ensoleillées !
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