Salut les confinés ! -10-

Biens et services essentiels ? Ou pas ?

Depuis mardi 17 mars nous sommes confinés. Comment la vie se déroule-t-elle dans ce village du péri-urbain lyonnais? Comment nous tenons-nous au courant de la marche chaotique du monde entre Venise, Copenhague et Washington où nous avons des amis ? Quels débats, quelles attentes, quels espoirs germent-ils dans cette situation de douce réclusion?

Danièle nous avait conseillé dans son blog  de suivre l’invitation du philosophe Bruno Latour  à l’auto-description proposée dans un article paru le 30 mars sur AOC :

Il s’agit de définir, en période de confinement, quelles sont les activités qui vous manquent et quelles sont les activités maintenant suspendues dont vous souhaiteriez qu’elles ne reprennent pas.

Et j’ai trouvé que c’était plus intéressant de commencer par les secondes. Car l’occasion est unique de disposer d’une page blanche où il n’y aurait plus de machines à fric du sport professionnel, plus de cours de bourse, plus de pèlerinage à La Mecque ou à Lourdes, plus de safari pour riches au Kenya, plus de semaine au soleil à Saint-Domingue avec des vols low cost, plus de courses automobiles ou de publicité partout. Je les cite en vrac, je vais essayer de hiérarchiser et préciser.

Commençons par la publicité.  Est-ce que ça me gêne vraiment, moi, en tant qu’individu ? Pas d’hésitation, c’est oui !

Pas une demi-heure devant la télé sans qu’on m’invite à acheter un SUV 200cv, de cette marque, de cette autre, et puis celui-ci qui est connecté, cet autre qui passe partout… Quand on sait que personne n’achète des voitures neuves sauf les entreprises et les particuliers aisés de plus de 60 ans. Les autres, plus fauchés, se rabattent sur l’occasion ou les premiers prix. Au bout du compte, on dit que ce sont 3,2 milliards € (à comparer aux 3,8 milliards de la redevance) qui partent ainsi en spot télé. Sans les pubs pour les bagnoles, TF1, M6 ou autres C 8 n’auraient plus qu’à fermer boutique. Si l’on rajoute les autres médias (les journaux papiers, la pub internet …) c’est 16 milliards. Et le double, 33 milliards, si on rajoute les autres canaux de la «communication» (marketing direct, mécénat,relations publiques …)! L’équivalent du budget de l’assurance chômage ou des dépenses de recherche-développement dans les entreprises!

Quand j’achète un yaourt Danone, c’est 15% de son prix qui part dans la pub, autant que les salaires des employés qui contribuent à sa production.

Est-ce que d’autres seraient gênés par la disparition de la pub ? Je n’en connais pas personnellement, chacun (les trois quarts des français d’après une étude) a sa petite astuce pour échapper à la pub : en profiter pour aller pisser, regarder ses mails, ou zapper sur une autre chaîne. Sur internet les bloqueurs de publicité ont un grand succès, au grand regret des annonceurs et de Google.

Sans la publicité, beaucoup de média disparaîtraient :TF1, C8, …Hanouna au chômage, qui s’en plaindrait ? En tout, pas mal d’emplois, dont beaucoup sont précaires pour les techniciens ou trop payés pour les vedettes.

Si on n’a plus la pub, il faudrait bien que les médias soient payés par les utilisateurs : la redevance (les chaînes publiques) ou l’abonnement : le modèle Canal+, les chaînes payantes, Netflix, l’information comme Médiapart. Et c’est le client, l’utilisateur qui décide et pas le système médiatico-publicitaire.

Dans le monde d’après, ces arguments devraient convaincre nos décideurs de supprimer ou de relativiser fortement la publicité. (voir l’excellent article des économistes attérés ) Eh, bien ! Non ! C’est le contraire qui se passe.

Ainsi la majorité macronienne a décidé que le sauvetage de la pub, étranglée par le confinement, était une grande cause nationale. C’est Aurore Bergé, députée LREM qui est montée au créneau.

Rapporteure générale du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle, elle propose, à coté de l’autorisation d’un peu plus de pub dans les programmes,  la mise en place d’un crédit d’impôt sur les dépenses de communication. Il y a urgence, d’après elle, à soutenir les médias mais aussi l’affichage, durant cette crise du coronavirus. Chaque euro dépensé viendra donc en diminution de l’impôt versé par les entreprises, donc payé finalement par les contribuables.

Les citoyens ont l’impression que la pub, c’est la condition du gratuit, mais c’est un faux-semblant. Cette pub c’est le consommateur qui la paye, c’est moi quand j’achète un yaourt Danone, c’est moi quand je paye mes impôts pour permettre que les entreprises déduisent leurs frais de pub. Tout ça pour venir polluer notre environnement immédiat : écran télé ou internet, séquences radio, couloir des métros…

Et pour sourire et vous donner des idées pour utiliser le stock de papier hygiénique et de Sopalin que vous avez dans vos placards: les autoportraits dans les toilettes d’avion de Nina Katchadourian :

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